FABRIQUÉ EN FRANCE : LA COMPÉTITIVITÉ PATRIOTIQUE : Rapport présenté par Franck Menonville et Anne-Marie Nédélec
Le 25 mai dernier, à l’occasion de l’enquête du Sénat sur le “fabriqué en France” Arnaud Montebourg était auditionné avec la géographe Anaïs Voy Gillis par la commission d’enquête. Les termes utilisés par l’ancien ministre du “redressement productif” sont sans équivoque : “On est dans un monde à l’envers.” ; “des pulls pour les gendarmes et la police tricotés en Chine, c’est un scandale.” Il dénonce également le “franco-lavage” confusion entretenue par certains commerçants sur l’origine de leur produit, vendus comme soi-disant “français” alors que ça n’est pas le cas. Pour lui, face à la désindustrialisation, il est urgent d’avoir une volonté politique forte quitte à “faire du Trump”. En quelques mots, résumons le rapport du Sénat.
1. LE FABRIQUÉ EN FRANCE, UNE RESSOURCE À MIEUX EXPLOITER :
Le “fabriqué en France” correspond à une forte demande des consommateurs qui sont 65% à vouloir acheter français. L’origine France est recherchée comme gage de qualité, durabilité, traçabilité des produits ainsi qu’un facteur d’emplois à l’intérieur de l’Hexagone. 75% des Français attendent du patriotisme économique et sont motivés pour acheter français sur des critères environnementaux également. Mais malheureusement l’origine vient seulement en 4ème position dans les critères d’achat et est confrontée à la crise du pouvoir d’achat qui touche beaucoup de français.
Prospective : on estime que relocaliser 10% des biens consommés par les ménages entraînerait 11.2 milliards de bénéfices et permettrait de créer 150 000 emplois.
2. LE FLOU DU FABRIQUÉ EN FRANCE POUR LES CONSOMMATEURS COMME POUR LES ACTEURS ÉCONOMIQUES :
Le nombre de règles, leur flou et le peu de contrôle effectué sur les appellations entraînent une confusion généralisée sur la notion de “Fabriqué en France”. Les 92 labels et certifications publics et privés entretiennent une grande confusion.
- D’abord, on compte 900 pages du Journal officiel de l’Union européenne sur la question du marquage de l’origine.
- Ensuite, on observe que dans le cas de la France, l’appellation « Fabriqué en France» ne signifie pas que le produit est 100 % français mais désigne une “dernière transformation substantielle” effectuée en France. Cette notion de “dernière transformation substantielle” est souvent critiquée pour son manque de clarté et d’ambition. Exemple : une confiture élaborée en France avec des fruits hors UE sera estampillée Origine France. Il faut également rappeler que de nombreuses autres appellations sèment le trouble : « Savoir-faire français », « Design français », «Conditionné en France ».
Enfin le peu de moyens concernant le contrôle : l’appréciation est effectuée au cas par cas par 6 agents du Service de l’Origine et du Made In France (SOMIF). Par exemple, un seul contrôleur est affecté au contrôle d’Amazon actuellement en France.
3. UNE CONJUGAISON D’ÉLÉMENTS HANDICAPANT LE FABRIQUÉ EN FRANCE
La réglementation européenne qui considère l’indication de l’origine comme une « mesure d’effet équivalent » à une « restriction quantitative à l’importation ». La désindustrialisation massive empêche une offre adéquate : la part de l’industrie manufacturière dans le PIB est de 11 % au plus. De nouveaux comportements de consommation venant des jeunes générations qui attachent moins d’importance à l’origine des produits et choisissent d’abord en fonction de leur pouvoir d’achat. La mode de la contrefaçon assumée est également un obstacle. La lutte contre la contrefaçon est insuffisante et inadaptée aux nouveaux modes de consommation en ligne. La France est le pays dont les entreprises sont les plus touchées par la contrefaçon, après les États-Unis, et devant l’Italie.
4. UNE COMMANDE PUBLIQUE QUI NE PROMEUT PAS SUFFISAMMENT LE FABRIQUÉ EN FRANCE
La commande publique constitue 8% du PIB pourtant, le site de l’UGAP, plus grosse centrale d’achat publique, ne propose qu’1 % de produits français (10 000 sur 1 million). Par ailleurs, la commande publique est éclatée entre 60 centrales d’achats publics. Il faudrait donc davantage centraliser les achats publics et augmenter la part du “Fait en France”. De nombreux handicaps concernent l’achat “Origine France” dans la commande publique à commencer par la préférence locale qui n’est pas admise par l’Union européenne.
Prospective : Si 25 % des marchés publics étaient réservés aux produits français, cela représenterait 50 milliards d’euros par an d’achats français.
5. CINQ AXES D’ACTIONS POUR VALORISER L’ATOUT DU FABRIQUÉ EN FRANCE
Axe 1 – Mieux identifier le fabriqué en France
Axe 2 – Rétablir une concurrence libre et non faussée
Axe 3 – Renforcer les contrôles sur le fabriqué en France
Axe 4 – Mobiliser la commande publique au service du fabriqué en France
Axe 5 – Informer et davantage responsabiliser le consommateur