Déficits de sûreté du musée du Louvre à la lumière du vol du 19 octobre 2025 et des prescriptions ministérielles

Déficits de sûreté du musée du Louvre à la lumière du vol du 19 octobre 2025 et des prescriptions ministérielles
27 octobre 2025 Olivier Debeney

Le vol survenu au musée du Louvre le 19 octobre 2025, au cours duquel plusieurs bijoux historiques ont été dérobés dans la Galerie d’Apollon, met en évidence un déficit de protection et de vigilance. Les auteurs ont pénétré dans le bâtiment par la façade côté Seine à l’aide d’un engin élévateur, neutralisant en quelques minutes les dispositifs humains et techniques en place. Les premières constatations révèlent une zone non couverte par la vidéosurveillance, une absence de détection périmétrique, et une sous-dotation en personnel de sûreté lors des heures de fermeture.

Ces défaillances contreviennent directement aux orientations fixées depuis quinze ans par les documents de référence du ministère : le guide “Sécurité des biens culturels” (2010), le vade-mecum “Sécurité des personnes et des biens” (2013), et le plan d’actions “Sécurité des cathédrales” (2023). Le premier insistait sur la nécessité d’une vidéosurveillance opérationnelle continue, de contrôles physiques renforcés et d’une coopération étroite avec les forces de l’ordre. Le second prescrivait une analyse systématique des vulnérabilités, l’entretien des dispositifs techniques et la formation du personnel. Le plan 2023, plus récent, a formalisé l’exigence d’un responsable unique de sûreté (RUS) et d’audits annuels assortis d’un tableau national de suivi des incidents. Aucun de ces principes ne semble avoir été pleinement appliqué au Louvre au moment du vol.

Sur le plan budgétaire, la situation traduit un déséquilibre entre les moyens disponibles et leur emploi effectif pour la sûreté. En 2025, le budget du ministère de la Culture s’élève à 4,45 milliards d’euros, dont 406 millions en autorisations d’engagement pour le Programme 175 “Patrimoines des musées de France” (Assemblée nationale, PLF 2025). Le Louvre bénéficie d’une subvention pour charges de service public de 95 millions d’euros, mais aucun poste budgétaire spécifique n’est identifié pour la sécurité des installations. L’ensemble des travaux de mise aux normes de sûreté et de sécurité des musées ne représente que 7,2 millions d’euros en autorisations d’engagement à l’échelle nationale (Annexe Culture, PLF 2025). Cette proportion — moins de 2% des crédits consacrés aux musées — illustre le sous-financement chronique des dispositifs anti-intrusion et de la maintenance de surveillance.

Ainsi, le vol d’octobre 2025 n’est pas un accident isolé, mais le symptôme d’un écart persistant entre les prescriptions nationales et leur application opérationnelle. L’absence d’un pilotage unifié, la dégradation des systèmes techniques et le manque de présence humaine effective ont rendu possible une intrusion prévisible. Les textes de 2010, 2013 et 2023 avaient précisément identifié ces faiblesses.

SOURCES
Ministère de la Culture. Sécurité des biens culturels : de la prévention du vol à la restitution de l’objet volé. Paris, 2010.
Disponible en ligne : culture.gouv.fr
→ Voir chap. 1, sections 1.1–1.2 (prévention des vols, dispositifs techniques et humains).
Ministère de la Culture. Vade-mecum – Sécurité des personnes et des biens. Tome II : Établissements culturels, plan de sauvegarde des œuvres. Paris, 2013.
Disponible en ligne : Scribd (copie officielle)
→ Voir introduction et chapitres sur l’analyse de vulnérabilité et la maintenance des dispositifs de sûreté.
Ministère de la Culture. Plan d’actions “Sécurité des cathédrales”. Paris, mai 2023.
Disponible en ligne : culture.gouv.fr
→ Voir sections sur le responsable unique de sûreté, la télésurveillance et le tableau de suivi des incidents (p. 40-45).
Compte-rendu et enquêtes de presse sur le vol au Louvre (19 oct. 2025) — Le Monde; Reuters; AP.