 
Par Aurélien Jean – membre du CRSI
« Il nous importe de donner davantage de chair à cette communauté et, pourquoi pas, un supplément d’âme ». Ainsi parlait en ces mots et devant le Parlement européen en 1989 l’alors président de la Commission européenne, Jacques Delors. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le volet judiciaire de son vœu a été exhaussé au-delà de ce qui pouvait être espéré aux débuts de la construction communautaire.
L’évolution du droit européen est perceptible ne serait-ce qu’au regard de la taille des bâtiments qui abritent ses juges et leurs services. D’une villa cossue mais somme toute étroite située au centre de Luxembourg dans les années 1950, le juge européen a déménagé sur le plateau du Kirchberg et, pour combler les besoins sans cesse croissants en personnel, a dû construire de multiples extensions parmi lesquelles trois grandes tours – dont la plus imposante, la tour Rocca, représente le plus haut édifice du Grand-Duché.
En parallèle le droit européen est passé d’un modeste ruisseau à un véritable torrent aux multiples ramifications, embrassant de près ou de loin une bonne partie des matières juridiques existantes. Certaines ont été complètement transformées par l’intégration européenne continue depuis les années 1960 : droit de la concurrence, des pratiques commerciales et, naturellement, droits fondamentaux (avec l’apport conséquent de la CEDH). Même des matières qui restent foncièrement du ressort de l’Etat peuvent trouver une acception européenne. L’immigration, le droit d’asile, la coopération judiciaire et pénale : autant de marqueurs forts de la volonté de créer un Espace de Liberté, de Sécurité et de Justice, au sens du traité de Maastricht de 1992, mais qui ont renforcé en conséquence l’office du juge européen.
A ce titre, évoquer « un juge » européen n’est pas tout à fait juste. Le grand public – pourvu qu’il en ait entendu parler et qu’il ne la confonde pas avec la CEDH (Cour européenne des Droits de l’Homme) située à Strasbourg – connait la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE). Sous cet acronyme figurent en réalité deux entités :
- Le Tribunal de l’UE, juge de première instance dans un certain nombre de cas et crée en 1989 pour désengorger la Cour de Justice. Il est composé de 54 juges (deux par Etat-membre – EM) mais n’a pas d’avocats généraux attitrés.
- La Cour de justice, juge suprême et historique du droit européen, composée de 27 juges (1 par EM) et de onze avocats généraux, chargés de rendre des conclusions. Traditionnellement, les « grands Etats » ont un Avocat général d’office, et les « petits » voient un système rotatif s’instaurer.
Au passage, mentionnons que, par le fruit d’une tradition remontant aux premières heures du droit communautaire, le français reste la langue de délibéré de la CJUE. Bien au-delà d’être simplement utilisée par les juges, elle est la langue de travail majoritaire, faisant de cette institution une exception alors qu’une grande partie des institutions européennes a adopté l’anglais comme lingua franca depuis quelques décennies déjà. Cela ne préjuge toutefois en rien de l’attachement au multilinguisme prôné par la Cour, qui se voit notamment dans les importantes ressources engagées pour la traduction et l’interprétation dans les 24 langues officielles de l’Union. Au demeurant d’ailleurs, en fin de procédure, seul le texte rédigé dans la langue de procédure fait foi. A noter aussi qu’il a existé à une époque un Tribunal de la fonction publique, exclusivement chargé des recours contre les institutions européennes en tant qu’employeurs. Ce tribunal spécifique a été dissous en septembre 2016 et sa compétence reprise par le Tribunal de l’UE.
Au-delà de cette parenthèse, il importe de noter que le juge européen n’échappe pas aux débats et aux critiques qui visent son homologue national, entre dénonciation d’un « gouvernement des juges », accusations de partialité et raisonnement juridique parfois (souvent ?) mal compris d’une partie de l’opinion publique en ce qu’il peut apparaître déconnecté du ressenti ou de l’expérience individuelle de chacun. De la même manière, la Commission de Bruxelles est aléatoirement perçue comme une sorte de superpuissance technocratique mise au pilori pour son manque de légitimité et qui contraindrait les EM à respecter des règles dont elle-seule décide. Au-delà de la caricature parfois pratique dans certains contextes nationaux et/ou locaux, il faut clarifier et « démystifier » les axes d’actions dont disposent réellement les services de la Commission. Bien loin des pouvoirs qui leurs sont parfois prêtés, il s’agit avant toute chose de faire respecter la cohérence et le respect uniforme du droit de l’Union – parfois (souvent ?) dans l’intérêt des EM eux-mêmes.
Ce faisant, il peut être intéressant de brosser un aperçu, simplifié, des procédures et des règles qui existent et qui permettent d’intégrer les EM dans un ensemble juridique continental. Ce faisant, cela implique de passer en revue les dispositifs d’action qui existent, le rôle des différentes institutions (et notamment celui de la Commission) et d’essayer de voir dans quelle mesure ils influent sur l’échelon national – non sans être exempts de limites ou de contre-pouvoirs éventuels.
- I – Ce que dit le droit
- A – Panorama rapide des différentes formes de procédures devant le juge de l’Union
- Remarques générales
 
 
- A – Panorama rapide des différentes formes de procédures devant le juge de l’Union
Lorsque l’on évoque un arrêt ou une ordonnance du Tribunal ou de la Cour de justice, il ne s’agit que de la forme finale du dispositif juridique rendu. En réalité, il existe plusieurs types de véhicules juridiques aptes à porter devant la juridiction compétente des infractions au droit de l’UE. A noter en outre que la base juridique sur laquelle s’appuient les juges européens est vaste et comprend :
- Le droit primaire, c’est-à-dire les traités (Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne – TFUE et Traité sur l’Union européenne – TUE), qui représentent les fondations sur lesquelles l’UE exerce ses compétences. Ces dernières peuvent être, selon les matières, exclusives (article 3 TFUE : commerce, concurrence), partagées (article 4 TFUE : agriculture, énergie) ou d’appui (article 6 TFUE : santé, culture).
- Le droit dérivé, composé des actes, législatifs ou non, adoptés par les institutions. Cela recouvre : les règlements, obligatoires et uniformes pour toute l’UE ; les directives, une obligation de résultat à transposer en droit interne ; les décisions, un acte de portée générale ou spécifique, obligatoire dans tous ses éléments ; les avis et recommandations (non contraignants) – sans oublier les actes délégués et les actes d’exécution. L’ensemble est consultable quotidiennement au Journal Officiel de l’UE.
A tout cela s’ajoute un corpus de textes procéduraux, qui régissent la manière dont les affaires sont traitées, les modalités d’introduction des recours, les obligations de forme des requêtes ou encore les délais à respecter aux différentes étapes. On peut citer parmi les plus importants :
- Le règlement de procédure de la Cour de justice ;
- Le règlement de procédure du Tribunal de l’UE ;
- Pour certaines matières jugées, des références au Statut de la Cour de justice sont effectuées ;
- Les dispositions pratiques d’exécution du Tribunal de l’UE, complétant plus en détail le règlement de procédure. Un tel document n’existe pas pour la Cour de justice.
Le présent texte n’a pas vocation à plonger en détail dans l’organisation pratique d’une procédure ni à analyser de manière extensive le droit procédural applicable aux litiges portés devant la CJUE. Néanmoins, et non sans certaines similarités avec des procédures contentieuses au national, on peut relever deux grandes étapes :
- La phase écrite consistant principalement en un échange de mémoires entre les parties (représentées par leurs avocats) : mémoire en requête puis mémoire en défense suivis par un mémoire en réplique lui-même préalable à un mémoire en duplique (ces deux derniers n’étant pas impératifs).
- La phase orale, comprenant notamment l’organisation d’une audience. Cette phase n’est pas obligatoire et, une fois les parties entendues, la formation de jugement peut décider de s’en passer si elle s’estime suffisamment éclairée par les pièces du dossier. En revanche, si des points à éclaircir subsistent, l’audience trouve son utilité en permettant aux juges de poser autant de questions qu’ils l’estiment nécessaire. Elle peut être complémentée de questions écrites à destination des parties.
Dans les cas qui l’exigent, les conclusions des avocats généraux peuvent être rendues sur la totalité de l’affaire ou sur quelques points de droit dûment demandés par la formation de jugement. En cas de phase orale, la présentation des conclusions clôture cette phase et marque le début du délibéré. Des mesures d’adaptation de la procédure son également possibles selon les cas spécifiques exposés.
Enfin, et de manière uniforme, chaque requête introduite devant le juge de l’UE se voit publiée au Journal officiel de l’Union européenne (disponible sur Eur-Lex). Cette publication au JOUE acte le début des divers délais à respecter pour les parties à un litige et scande les grandes étapes de la procédure. L’affaire peut être introduite dans l’une des 24 langues officielles de l’UE, qui sera donc la langue de procédure. Sauf très rares cas, une traduction de tous les documents est aussi effectuée en français, langue de travail principale parmi les juges.
- La question préjudicielle
Ce moyen est devenu l’un des principaux vecteurs de décision de la CJUE et permet de préciser le droit au regard d’un cas d’espèce qui lui est présenté par le juge national (voir aussi plus loin dans ce texte). Point crucial, l’interprétation juridique rendu pour ce cas d’espèce s’applique à toutes les cours de l’UE dans les futures affaires qu’elles auront à connaître sur ce point. La QP est régie par l’article 267 du TFUE et complétée pour ses modalités pratiques par les règlements de procédure du Tribunal et de la Cour de justice.
Il est important de mentionner que, dans l’acception retenue, le juge de droit commun de l’Union est le juge national, chargé de faire respecter les règlements et directives à son échelon. Ce faisant, lorsqu’il est saisi d’un doute ou que le texte à interpréter n’est pas clair, il peut sursoir à statuer et se tourner vers la CJUE, afin d’obtenir une réponse qui garantira l’homogénéité du droit.
- Le recours en manquement
Il s’agit ici pour la Commission de s’assurer que l’EM en question respecte bien les obligations qui lui incombent en vertu des actes adoptés par les institutions (voir aussi plus loin dans ce texte). Après une procédure préalable engagée par la Commission et en l’absence de changements probants, celle-ci peut saisir la Cour de justice afin d’enjoindre l’EM à se mettre en conformité. En théorie, un EM peut attaquer un autre EM en manquement, mais cette pratique est rare pour des raisons politiques et diplomatiques évidentes. Ce recours est régi par l’article 258 du TFUE.
- Le recours en annulation
C’est l’un des recours les plus fréquents, défini aux articles 263, 264 et 265 du TFUE. Il s’agit ici pour le requérant de contester la légalité d’un acte d’une institution ou d’un organe de l’UE, et donc de demander qu’il soit effacé de l’ordre juridique européen. La matière est partagée entre la Cour de justice (recours formés par un EM contre les directives, règlements, etc… sous certaines exceptions) et le Tribunal qui s’occupe du reste, notamment ceux intentés par les particuliers (exemples de mesures restrictives prises au regard de la situation internationale : Russie, Syrie…). Le recours doit être déposé dans les deux mois qui suivent la publication au JOUE de l’acte faisant grief.
Le champ du recours en annulation est assez vaste et soumet au contrôle de la CJUE non seulement les actes des institutions (Conseil, Commission, Parlement, CJUE, BCE) mais aussi ceux des diverses agences, organismes et autres bureaux. Seuls les actes destinés à produire des effets juridiques à l’égard des tiers sont concernés – ce qui exclut les recommandations, avis et autres actes de nature purement communicationnelle ou confirmative. Point de taille : plus que le véhicule juridique utilisé, c’est l’intention qui compte, ce qui rend les conclusions du Conseil contestables devant la Cour.
- Le recours en carence
Régi par l’article 265 du TFUE, il peut être introduit dans les cas où une inaction d’une institution ou d’un organe de l’Union est soupçonnée contraire au droit européen, c’est-à-dire s’ils s’abstiennent de statuer. Le fait juridique recherché est donc de savoir si l’absence d’action revêt un caractère légal ou non. Pour introduire ce type de recours, une injonction à agir doit au préalable avoir été envoyée a minima deux mois auparavant. Passé ce délai, une action en carence peut être entreprise dans un nouveau délai de deux mois La compétence est, ici aussi, partagée entre Tribunal et Cour selon des modalités similaires au recours en annulation.
- Addendum
A noter en complément qu’il existe aussi une possibilité de se pourvoir devant la Cour de justice après un arrêt ou une ordonnance du Tribunal. La Cour peut alors décider de trancher le litige, l’annuler et le renvoyer (en tout ou partie) au Tribunal ou bien simplement rejeter le pourvoi. Dans le cas d’une annulation, elle ne tranchera que les litiges en état d’être jugés ; des points de droit non examinés par le Tribunal lui seront renvoyés par la Cour. Dans certains cas, un processus préalable détermine si le pourvoi peut être admis ou non. C’est notamment le cas d’affaires qui ont déjà bénéficié d’un double examen : d’abord par une chambre de recours indépendante d’un organe de l’Union (exemple : EUIPO, l’office pour la propriété intellectuelle), puis par le Tribunal.
Pour être encore plus exhaustif, il est loisible au juge, en cas de litige présentant des caractéristiques hautement similaires et renvoyant au même faisceau d’arguments, de désigner une « affaire-pilote » parmi lesdites affaires semblables. Les autres seront suspendues le temps de l’instruction de l’affaire pilote et se verront « débloquées » une fois le dispositif juridique prononcé.
Enfin, l’intervention de parties tierces (entreprises, associations, individus…) au litige mais démontrant un intérêt à sa solution est possible, sous couvert d’en faire la demande et de prouver son affectation directe et individuelle. En cas d’admission, les intervenants peuvent apporter leur soutien au requérant ou au défendeur. A noter que les EM et les institutions peuvent aussi être intervenants, mais ils le sont de droit, sans que l’accès à une affaire ne soit conditionné à un intérêt dûment motivé.
- B – Le pouvoir de la Commission pour enjoindre les EM au respect du droit de l’Union
- Principe
 
La principale arme de la Commission pour enjoindre un EM à respecter les engagements réside dans le recours en manquement. Le mécanisme vise à assurer le respect du droit dérivé par les États membres et permet à la Commission de poursuivre un EM qui ne respecte pas ses obligations (transposition et/ou application effective d’un règlement ou d’une directive). Bien que les États aient également la possibilité d’engager une telle procédure entre eux, une autorité indépendante extérieure aux débats internes au Conseil semble plus appropriée.
La démarche du recours en manquement est un triple signal envoyé aux capitales :
- Tout d’abord, elle vise à garantir l’application uniforme du droit européen dans tous les États membres, ce qui est fondamental pour le bon fonctionnement du marché intérieur et la cohésion de l’Union. En matière de sécurité intérieure, la logique est identique, mais appliquée à l’asile, la citoyenneté européenne, etc.
- Ensuite, elle permet de protéger les droits des citoyens et des entreprises qui pourraient être affectés par une mauvaise transposition ou application des directives et règlements européens.
- Enfin, cette procédure renforce l’autorité de la Commission européenne en tant que gardienne des traités, s’assurant ainsi de continuer à être vue comme une autorité crédible, capable de faire respecter ses prérogatives. Ce dernier aspect n’est pas moindre lorsque l’on considère le défi permanent pour l’UE de défendre son bien-fondé face à des remises en cause fréquentes depuis les années 1990 – et la fin de ce que l’on a appelé le « consensus permissif » des premières décennies.
En somme, pour une institution qui base l’entièreté de sa légitimité et nombre de ses moyens d’action sur le droit, il s’agit de maintenir sa capacité d’action et son efficacité. Si les États membres ne respectent pas les règles, cela peut entraîner à terme des distorsions, des inégalités de traitement et une perte de confiance dans les institutions européennes (qui, selon les années et les Eurobaromètres, peut se révéler fluctuante).
- Détail de la procédure du recours en manquement
La procédure de recours en manquement est détaillée et structurée, visant à donner à l’État membre concerné plusieurs opportunités de se conformer avant que l’affaire ne soit portée devant la Cour de Justice de l’Union Européenne. Dans tous les cas, la décision est prise par le Collège des Commissaires, sur rapport des services juridiques. On peut le résumer en quatre étapes majeures :
- Enquête préliminaire : La Commission européenne commence par recueillir des informations et peut demander des clarifications à l’État membre concerné. Cette phase peut inclure des échanges de correspondance et des réunions. Elle peut décider d’ouvrir automatiquement des procédures d’infraction après deux mois en cas de non-communication de la part de l’EM concerné. Elle peut enfin se fonder sur des informations transmises par des tiers alléguant de violations du droit de l’Union (pétitions, questions écrites, etc.) qui, si elles sont bien trop nombreuses et parfois trop peu étayées pour constituer un dossier crédible peuvent néanmoins constituer des « capteurs » à même de fournir un suivi d’une situation ou d’un EM spécifique.
- Lettre de mise en demeure : Si la Commission estime qu’il y a une violation du droit de l’Union, elle envoie une lettre de mise en demeure à l’État membre. Cette lettre expose les raisons pour lesquelles la Commission considère qu’il y a manquement et demande à l’État membre de présenter ses observations dans un délai généralement fixé à deux mois.
- Avis motivé : Si l’État membre ne répond pas de manière satisfaisante à la lettre de mise en demeure, la Commission peut émettre un avis motivé. Ce document précise les points de non-conformité et accorde à l’État membre un délai supplémentaire, généralement de deux mois, pour se conformer et expliquer en détail les mesures de conformité qu’il compte prendre. Dans le cas contraire, si elle s’estime satisfaite de la réponse de l’EM, la Commission peut classer l’affaire sur base de son analyse juridique.
- Saisie de la CJUE : Si, malgré l’avis motivé, l’État membre ne prend pas les mesures nécessaires pour remédier à la situation au jour de l’expiration dudit avis, la Commission peut décider de saisir la CJUE. La Cour examine alors l’affaire et peut rendre un arrêt constatant le manquement. Si l’État membre ne se conforme pas à l’arrêt de la Cour, la Commission peut engager une nouvelle procédure pour non-respect de l’arrêt, qui peut aboutir à des sanctions financières.
- C – La question préjudicielle, partiellement transférée au Tribunal, est aussi un moyen de préciser le droit européen
Comme mentionné plus haut, le dispositif de la question préjudicielle (aussi appelée « demande de décision préjudicielle » – DDP) est d’une importance capitale. Non seulement car il permet d’assurer le respect des règles de l’Union dans l’affaire portée à son appréciation par la Cour nationale, mais il oblige en outre l’ensemble des juges des EM – quel que soit le niveau de juridiction – à appliquer l’interprétation retenue par la CJUE dans le cas où ils auraient à connaître d’un problème juridique identique.
- Généralités et répartition des compétences
La DDP ne peut être posée que par une juridiction nationale (au sens de l’article 267 TFUE), ce qui exclut les juridictions arbitrales, qui ont une origine contractuelle (et non légale). Aussi, et par une certaine évidence, seules les juridictions des EM de l’Union peuvent recourir à ce mécanisme. Autrefois du ressort exclusif de la Cour de justice, la DDP a vu un transfert partiel s’opérer vers le Tribunal, mais uniquement sur certaines matières :
- Taxes telles que le système commun de TVA ou les droits d’accise ;
- Matières douanières (code des douanes et classement tarifaire des marchandises) ;
- Système d’échange des quotas d’émission de gaz à effet de serre ;
- Contentieux de certains services de transport (annulations/retard – indemnisation/assistance aux passagers).
On le voit, ces thématiques ne sont pas celles qui intéressent au premier chef la sécurité intérieure des EM (quoique certaines matières douanières puissent s’y rapporter). Ce faisant, le reste des DDP continue d’être traité par la Cour de justice, en ce qu’il induit potentiellement des arrêts de principe sur des grands points du droit européen ou des questions hautement symboliques (l’asile, la citoyenneté, la migration ou la coopération civile et pénale) :
- Droit primaire (les traités), y compris la Charte des Droits Fondamentaux ;
- Droit international public ;
- Principes généraux du droit de l’Union ;
- Matières relevant du Tribunal mais combinées avec d’autres matières – en ce cas, la Cour de justice tranche. De toute manière, toute DDP doit être introduite devant la Cour de justice, celle-ci déterminant si la matière est de son ressort de celui du Tribunal.
Si la DDP ne peut être posée que par une cour nationale, excluant a priori le citoyen lambda, la pratique est différente puisqu’un litige introduit par un justiciable permet de faire préciser les règles de droit qui le concernent directement (le cas des migrations et de la politique d’asile est particulièrement éclairant). Cela est permis notamment car toutes les parties présentes au contentieux national sont intéressées à la procédure de DDP, avec la possibilité pour les EM et les institutions de l’UE d’intervenir au soutien d’une des parties.
- Caractéristiques de la procédure générale
La question préjudicielle est une faculté, et non une obligation impérative. Une partie qui conclut au national en demandant une DDP peut être suivie par le juge ou non. Seul ce dernier dispose de la libre appréciation du point de droit en cause, et donc peut déterminer s’il doit être éclairé pour l’appliquer. La DDP n’est donc pas un mécanisme fourre-tout appelé à prendre le pas sur la fonction d’un juge national simple exécutant. Il s’agit avant tout d’assurer la cohérence et la bonne application du droit de l’Union. Ainsi, plusieurs aspects doivent être pris en compte, dont :
- Le caractère juridictionnel de la procédure : par exemple le Conseil d’Etat ne statuant pas au contentieux ne peut pas poser de DDP, car les avis sur les projets de loi du Gouvernement ou sur les propositions de loi du Parlement n’emportent pas de valeur juridictionnelle immédiate.
- Le litige doit être réel et actuel. Un conflit qui ferait naître une question de nature hypothétique ou fictive – ou simplement trop générale pour s’appliquer à un cas particulier défini – ne peut faire l’objet d’une DDP.
- Si l’application de la norme s’impose avec une telle évidence que le renvoi préjudiciel ne trouverait comme solution qu’une réponse identique à ce qui a déjà été jugé, la DDP a un caractère inutile. Si la manière d’appliquer la norme ne laisse place à « aucun doute raisonnable » et que le juge estime qu’elle s’impose à toutes les juridictions de l’UE avec la même évidence, poser une DDP n’est pas nécessaire (CJCE, 1982, CILFIT).
- Le juge national doit fournir l’ensemble des éléments pertinents du dossier pour permettre à la CJUE de pouvoir justement évaluer la situation. Ce faisant, c’est bien l’autorité de renvoi qui décide de la manière de poser la question, de sa formulation et des points à interroger. De même, la juridiction nationale est responsable des éléments d’informations fournis à la Cour. Cela signifie que les parties au litige ne pourront pas faire valoir d’arguments fondés sur d’hypothétiques autres aspects du dossier qui n’auraient pas été communiqués. La CJUE ne se base que sur les pièces reçues et ne statue que sur le seul fondement de celles-ci. De manière logique, elle laisse l’appréciation des dépens et le règlement pratique du dossier à l’initiative du juge de renvoi.
Lorsqu’elle est introduite devant la Cour, la DDP n’a pas de caractère spécifique lui conférant une priorité accrue par rapport aux autres types d’affaires introduites. Qu’elle soit examinée au Tribunal ou à la Cour de justice, elle se placera dans l’ordre d’entrée des affaires déjà introduites, et qui sont examinées par date d’introduction. La DDP reçoit donc un numéro d’ordre suivant la suite logique des cas enregistrés depuis le début de l’année civile (ex : C-000/25 pour la Cour de justice ou T-000/25 pour le Tribunal). Comme pour d’autres affaires introduite par divers véhicules, la DDP peut être examinée par une chambre à trois, cinq, sept ou quinze juges selon sa complexité, son importance pour l’unité ou la cohérence du droit de l’Union ou si un EM ou une institution partie à l’instance le demande (et le justifie). La décision sur la DDP n’est pas susceptible de recours ou de pourvoi.
- Adaptations et procédures spécifiques
Il existe d’abord la procédure simplifiée, qui désigne une affaire présentant de grandes similitudes avec un cas ayant déjà été jugé : connexité d’objet, similitude de la question posée, faits ne laissant place à aucun doute raisonnable, déduction claire de la jurisprudence, etc. Une fois l’avocat général entendu, la Cour peut statuer par voie d’ordonnance motivée, s’épargnant ainsi la tenue d’une audience et de procédures écrites et orales trop longues pour un objet n’en valant pas le coup.
Ensuite, il est possible de recourir à la procédure préjudicielle d’urgence (PPU). Elle permet de traiter dans un délai très raccourci les questions les plus sensibles relatives à l’espace de liberté, de sécurité et de justice : libre circulation des personnes, asile et immigration, visas, coopération policière et judiciaire, etc. Les affaires soumises à la PPU sont confiées à une chambre composée de cinq juges. La phase écrite se déroule essentiellement par voie électronique et est restreinte tant dans sa durée que dans le nombre d’acteurs autorisés à y intervenir. Pour ces derniers, il y a toujours possibilité d’intervenir durant la phase orale, qui est obligatoire. Le numéro d’ordre de l’affaire reste le même mais est adjoint des lettres « PPU » à sa suite.
Assez similaire, la procédure accélérée permet à la Cour de justice de prioriser des affaires présentant une urgence extrême via la réduction des délais au maximum. L’initiative motivée vient d’une demande introduite par la juridiction nationale qui saisit la Cour en exposant les circonstances motivant l’urgence à statuer. Le président de la Cour statue ensuite, l’avocat général et le juge rapporteur entendus. Une telle procédure est également prévue pour d’autres affaires introduites par des véhicules juridiques différents, dans ce cas sur demande d’une des parties. Il ne faut pas confondre cette procédure avec le référé. Ce dernier vise à obtenir le sursis à l’exécution d’un acte d’une institution ou toute autre mesure provisoire nécessaire pour prévenir un préjudice grave et irréparable au détriment d’une partie – en parallèle de l’introduction d’un recours contre ledit acte.
- D – L’évidence : la force obligatoire des arrêts et la procédure afférente
Pour toute société qui se fonde sur les principes de la démocratie et de l’état de droit, le seul moyen de trancher un litige se situe devant le Juge (ou plutôt les juges selon la durée et la complexité de l’affaire). Néanmoins, le dispositif de l’arrêt en lui-même n’est qu’un raisonnement juridique, certes argumenté et construit, mais qui présuppose une architecture entière afin de traduire les mots en faits. C’est là tout l’intérêt de faire exécuter des décisions de justice. Sujet d’une absolue évidence en matière pénale, ça l’est tout autant dans le droit européen, dont la force obligatoire du droit n’est pas un considérant abscond. Que l’on se réfère pour illustration au refus de certains EM d’appliquer des décisions ou à la lecture par certaines juridictions d’une autre hiérarchie des normes (Pologne). Ainsi, aux fins d’assurer le respect des arrêts et ordonnances de la CJUE, l’article 260 du TFUE définit une procédure précise.
Dans un premier temps, et sans grande innovation procédurale, la Commission envoie à l’EM concerné une lettre de mise en demeure – c’est l’unique avertissement écrit avant de saisir la CJUE si la situation n’évolue pas. Ladite saisie sera la seconde dans le cas du même dossier, attendu que l’application de la solution du premier n’a pas trouvé d’écho. Pour cette raison, la Commission peut dès ce stade proposer d’infliger des sanctions financières à l’EM récalcitrant, selon la durée et la gravité du dossier. Les sommes peuvent être de deux ordres : un montant forfaitaire basé sur le temps écoulé depuis le prononcé du premier arrêt et une astreinte journalière à dater du second arrêt de la Cour (= jugeant le non-respect du premier) et jusqu’à complète résolution de l’infraction. Ces deux volets sont donc cumulatifs, mais ne peuvent intervenir que s’il y a une nouvelle saisie de la CJUE.
Cas particulier : un EM qui n’a pas transposé une directive dans le délai prévu par celle-ci peut se voir condamner à des sanctions financières – somme forfaitaire et astreinte journalière – dès le prononcé du premier arrêt, donc sans seconde saisine de la Cour mais uniquement si la Commission conclut en ce sens. Cette possibilité est aussi prévue à l’article 260 du TFUE (§3). A noter que la Commission ne peut que proposer des montants de sanction selon une méthode accessible à tous ; la somme qui sera effectivement retenue restant à l’entière appréciation du juge
- II – Ce que disent les faits
- A – La Commission se saisit de son pouvoir de « Gardienne des traités »
- La Commission dans son rôle
 
 
- A – La Commission se saisit de son pouvoir de « Gardienne des traités »
Il importe de prime abord de mentionner que la Commission est très vigilante sur l’application des textes par les EM. Comme mentionné, c’est de la bonne application par ceux-ci des règles décidées à Bruxelles que dépend une partie des propres pouvoirs de la Commission. Un EM où serait déniée l’application des règlements et autres directives dénierait également – à dessein ou non – par là même la compétence des institutions européennes à intervenir sur ces sujets. Ce faisant, l’institution exécutive du système européen à tout intérêt à montrer au grand public qu’elle est fondée en droit à exiger des EM qu’ils se conforment aux règles qu’ils ont eux-mêmes souscrites. Pour cela, des communiqués de presse sont diffusés à intervalles réguliers, et récapitulent l’ensemble des actions intentées contre les EM estimés réticents. Ces actions peuvent aller du simple rappel écrit à une assignation devant la CJUE et visent absolument toutes les matières législatives, sans idée de priorité sur tel ou tel sujet ni de « focus » particulier envers un pays ou un autre. On peut tout aussi bien retrouver « en tort » des pays récemment entrés dans l’UE que d’autres, présents dès les premières heures de la CECA.
L’évaluation du respect de la transposition ne relève pas non plus d’une machinerie complexe et/ou arbitraire : vérification de la tenue des délais mentionnée dans le texte voté, de l’exhaustivité de la traduction en droit national au regard des obligations du texte initial ou encore de la conformité juridique de ce qui est transposé (pas de contresens ou de dénaturation de l’objet initial). Pour apprécier l’exactitude de l’action nationale, les EM doivent fournir à la Commission des documents explicatifs clairs et suffisamment précis pour chaque texte transposé, obligation dont l’importance est reconnue par la CJUE (Commission/Belgique, C-543/17).
Pour ce faire, la Commission publie généralement chaque mois la liste des procédures intentées contre les EM. En complément des actions juridiques propres devant la CJUE, il est porté à la connaissance de la presse et du public les lettres de mise en demeure et les avis motivés. La masse conséquente représentée par l’entièreté de ces procédures (détaillées en chapitres) montre bien à quel point la Commission est vigilante sur le respect des engagements et n’hésite pas à publiciser son action. Il y a un double objectif à une stratégie si affirmative : d’une part justifier son action et ses compétences ; d’autre part montrer aux EM que les décisions européennes sont contraignantes et ne pas laisser s’installer une forme de « sur-flexibilité » pouvant dégrader l’intégration et le rapprochement des législations.
A noter enfin que la Commission ne se réjouit pas particulièrement de lancer des procédures contre les EM. Qui dit procédure dit consommation de temps, d’argent et de ressources humaines – les institutions européennes sont très souvent représentées par leurs agents, et non par des avocats externes. Qui plus est, et malgré toutes les garanties de fond dont se munissent les parties dans leur argumentation, le résultat n’est jamais certain ; et le paiement des dépens pour la partie qui succombe peut atteindre un montant certain – notamment lorsque les affaires durent des années et enchaînent les étapes (Tribunal, pourvoi, renvoi potentiel, etc.).
A ce titre, tout ce qui peut éviter une procédure et aboutir au même résultat est un gain de temps et d’argent – voire une préservation de certaines relations fonctionnelles avec les EM. Pour ce faire, dans l’optique d’éviter autant que possible les recours au contentieux, la Commission a lancé EU Pilot, qui vise à obtenir une mise en conformité plus rapide que ce qui pourrait être fait par une procédure « classique ». Une forme de médiation en quelque sorte, particulièrement utile dans des dossiers impliquant des caractéristiques techniques et/ou très spécialisées ou simplement pour recueillir des informations. En revanche, si l’infraction est évidente et/ou bien documentée et/ou assumée par l’EM, EU Pilot laisse sa place à un contentieux en bonne et due forme : Etat de droit, valeurs fondamentales, brèche évidente du marché commun ou encore dossiers techniques/économiques sensibles.
- Exemples de procédures récentes en matière de justice, migration et affaires intérieures
Pour retrouver la liste exhaustive des procédures intentées dans l’intégralité des matières, se référer ici pour le mois de juin 2025 et ici pour le mois de juillet 2025. Pour une vue graphique et pédagogique des différents indicateurs de transposition et des procédures en cours, par matières et catégories, se reporter à la page web dédiée de la Commission.
Recours intentés :
Le 18 juin 2025, la Commission a saisi la CJUE contre trois EM (Irlande, Portugal et Bulgarie) en raison du non-respect de certaines obligations découlant du règlement 2021/784 sur la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne. Malgré une lettre de mise en demeure envoyée en janvier 2023 et un avis motivé en février-mars 2024, ces EM ont manqué à des obligations telles que : désignation de l’autorité nationale chargée de faire respecter le règlement et notification de celle-ci à la Commission ; définition du régime de sanctions et des mesures prises en cas de non-respect de leurs obligations par les fournisseurs de services d’hébergement ou encore l’établissement d’un point de contact public pour le traitement des demandes et des retours d’informations liés aux injonctions de retrait.
Ce même jour, la Commission a également saisi la CJUE contre la Pologne et la Suède en raison du non-respect d’une décision-cadre 2002/584/JAI relative au mandat d’arrêt européen – malgré des mises en demeure envoyées en 2021 et 2020 et des avis motivés en 2023 et 2024. Dans les deux cas, ce sont certains points non correctement transposés qui font griefs (audition/transfèrement possible d’une personne dans l’attente de la décision finale pour Stockholm ; motifs de refus, situation dans l’attente de la décision, transit et garanties à fournir par l’EM d’émission dans certains cas pour Varsovie).
Enfin, le 17 juillet 2025, la Commission a saisi la Cour de Luxembourg contre la Slovaquie pour transposition incorrecte des règles relatives au droit à un avocat et au droit de communiquer en cas d’arrestation (directive 2013/48). Cela fait suite à un avis motivé adressé en novembre 2023 et à un avis motivé complémentaire de juillet 2024, tenant compte de modifications dans la loi slovaque. Néanmoins, la Commission estime qu’il subsiste encore des inquiétudes dans des droits pouvant être revendiqués par certains suspects non-encore formellement mis en accusation (accès à un avocat avant l’interrogatoire).
Avis motivés :
Par une communication du 18 juin 2025, la Commission a adressé un avis motivé à l’Allemagne, au Luxembourg et à la Pologne en raison de la non-transposition de la directive 2019/997 et de la directive déléguée 2014/1986 relatives aux titres de voyage provisoires en cas de perte, vol ou destruction du passeport en territoire hors-UE. La Belgique a aussi été concernée, via le « paquet de mesures » de juillet 2025. Contrairement à d’autres procédures ici répertoriées, le calendrier a été plus rapide : lettres de mise en demeure en janvier 2025 et avis motivés en juin 2025, le tout car la délivrance desdits titres provisoires doit être opérationnelle pour décembre 2025. On le voit, la rapidité des procédures est surtout fonction du sujet et de l’appréciation qu’en fait la Commission.
Autre exemple, le 17 juillet 2025, la Commission a adressé un avis motivé à la Bulgarie au sujet de la directive 2010/64 relative au droit à l’interprétation et à la traduction en matière de procédures pénales. Incluse dans un paquet régissant les normes minimales de garantie des droits des suspects, cette réglementation vise à la fourniture d’une interprétation et d’une traduction de documents essentiels pour les suspects ne parlant pas la langue de la procédure.
Lettres de mise en demeure :
La commission a décidé, en juin 2025 d’envoyer une lettre de mise en demeure à la Finlande et à l‘Italie en leur enjoignant de transposer en droit national la directive 2021/555 relative aux armes à feu. Celle-ci établit des normes minimales communes concernant l’acquisition, la détention et l’échange commercial d’armes à feu à usage civil renforce leur marquage et leur traçabilité et établit des spécifications techniques additionnelles. Dans le cas d’Helsinki, la mise en demeure vise aussi à transposer certaines dispositions des directives d’exécution 2019/68 et 2019/69. A noter que des mises en demeure ont été envoyées sur ce même sujet à la Croatie, au Luxembourg et à la Pologne en juillet 2025.
Ce même mois, l’Irlande a, elle, été enjointe à respecter les obligations du règlement 2019/1148 relatif à la commercialisation et à l’utilisation de précurseurs explosifs (substances susceptibles d’être utilisées pour des mélanges explosifs artisanaux). Il limite la disponibilité de ces produits et exige que toute transaction suspecte les impliquant soit signalée aux autorités compétentes. Il est reproché à Dublin une transposition incorrecte, notamment en l’absence de la désignation d’une autorité compétente pour la mise en œuvre du règlement, en l’absence d’un régime de sanctions ou encore en l’absence de notification des mesures prises dans le cadre de l’octroi des licences.
- B – La CJUE tire son influence du droit, mais ne peut aller au-delà de ses compétences.
- Une influence tirée de la pleine exploitation du droit
 
En matière d’affaires intérieures, la CJUE peut avoir une certaine influence. Si sa compétence est limitée sur les matières « dures » (relevant du pénal, apanage des lois nationales), elle peut en revanche avoir à connaitre des situations afférant à la citoyenneté ou à l’asile. C’est ainsi que, récemment, elle a été appelée à se prononcer sur le régime de citoyenneté par investissement mis en place à Malte via un recours en manquement introduit par la commission (affaire C-181/23, Commission/Malte). De la même manière, elle a déduit de l’affaire Kinsa (C-460/23) des principes, sinon révolutionnaires, au moins importants dans la prise en considération de ce qu’est ou non une entrée illégale sur le territoire de l’Union. Pour ces deux affaires se référer aux explications fournies dans les brèves du CRSI (ici pour Malte et là pour Kinsa).
On le voit, les matières jugées conservent un certain caractère symbolique, en ce qu’elles touchent à des aspects traditionnellement compris comme étant du ressort d’un Etat : sa capacité à accorder la citoyenneté dans un cas et à accepter qui rentre ou ne rentre pas sur son territoire dans l’autre. Ce faisant, et loin d’une interprétation extensive de leurs pouvoirs, les juges n’ont fait que se saisir des traités et autres directives réglementant le droit des affaires soumises à leur contrôle. Ainsi, il serait faux de parler de « détournement de pouvoir » ou de « gouvernement des juges », en ce que la direction politique nationale a consenti à ces transferts et au contrôle de leur application ; dans le droit primaire d’abord puis les négociations de textes de rang inférieur ensuite.
Il n’est pas faux de dire que la Cour s’est construite sur une interprétation du droit primitif de la CEE parfois perçue comme assez audacieuse, a minima pour assurer sa crédibilité et imposer aux EM son autorité dans la gestion du proto-marché unique. Pour ce faire, la combinaison de différentes approches (textuelle, téléologique, etc.) a permis de rendre un certain nombre d’arrêts marquants dans l’histoire du droit européen, qui ont permis sa construction et, surtout, son affermissement. Notons, entre autres et pour quelques exemples anciens et naturellement non exhaustifs :
- Arrêt Van Gend en Loos (26/62, 1963) : principe d’effet direct (= applicabilité directe) du droit communautaire, avec la possibilité d’invoquer directement le droit européen sans passer par une norme nationale ;
- Arrêt Costa/ENEL (6/64, 1964) : principe de primauté du droit communautaire sur le droit national ;
- Arrêt Simmenthal (106/77, 1978) : principe de primauté du droit communautaire y compris en cas de loi nationale postérieure. En clair, une loi nationale contraire à une norme européenne, entrée en vigueur après la norme européenne devra être écartée par le juge (sans attendre son abrogation ou sa déclaration d’inconstitutionnalité).
- Arrêt Rewe-Zentral AG dit « Cassis de Dijon » (120/78, 1979) : principe de la reconnaissance mutuelle par les EM de leurs règlementations respectives, en l’absence d’une norme communautaire.
Il faut néanmoins garder à l’esprit que le juge reste un juge, et qu’il ne peut absolument pas faire dire au droit ce que celui-ci ne dit pas ou bien, a fortiori, réfute. Ainsi, la CJUE n’est pas compétente pour certaines matières explicitement prévues par les traités (notamment lorsque l’on touche à la PESC), et ne manque jamais de le rappeler dans sa jurisprudence. Elle rejette aussi de manière systématique tout recours direct qui n’est pas dirigé contre une institution de l’UE ou toute argumentation manifestement dépourvue de pertinence et/ou de fondement en droit. A ce titre, on peut mentionner deux exemples qui, outre ce qui vient d’être mentionné, illustrent les limites qui se posent toujours à l’exercice du droit de l’UE et à ce qu’il peut – ou ne peut pas – faire.
- Le dialogue des juges au défi de l’ultra vires.
Le coup de semonce allemand (2 BvR 859/15, 2 BvR 1651/15, 2 BvR 2006/15 et 2 BvR 980/16)
Le terme « ultra vires » (litt. « au-delà des pouvoirs ») fait référence à une situation où une institution européenne (singulièrement la Commission ou la CJUE) agit en dehors des compétences qui lui sont attribuées par les textes. Dans ce cas, les actes adoptés de cette sorte devraient être déclarés juridiquement invalides car remettant en cause par leur objet même le consentement démocratique des EM donné aux institutions de l’UE. C’est selon cette logique que la Cour constitutionnelle allemande a prononcé un ultra vires en 2020.
Cet arrêt concernait un programme de la BCE visant à acheter des actifs publics (PSPP, une partie du quantitative easing adopté par la BCE en 2015). Déjà en 2012, le juge allemand avait eu un doute sur la légalité d’une décision de la BCE, mais avait respecté l’arrêt Gauweiler de la CJUE (C-62/14). Ici, et malgré une nouvelle question préjudicielle posée, la Cour de Karlsruhe a estimé que les juges européens n’ont pas effectué correctement leur contrôle de légalité – notamment du point de vue de la proportionnalité. Le fait que la CJUE ait limité son contrôle lors de l’examen de la DDP ne lui a, pour le Bundesverfassungsgericht, pas permis de voir les effets de la décision de la BCE sur la politique économique et budgétaire des EM – un domaine qui, contrairement à la monnaie, est du ressort des Etats. D’où la rupture de la proportionnalité constatée par les juges et le raisonnement en ultra vires de ces derniers.
Ce faisant, le juge allemand donne la responsabilité aux autorités nationales de contrôler les actions de l’UE afin de s’assurer qu’elles ne vont pas plus loin que ce à quoi le peuple allemand a consenti. La Bundesbank n’aurait donc pas du participer à la mise en œuvre de cet acte. Le raisonnement juridique a été très commenté, critiqué parfois, et peut représenter une forme de « résistance » du juge national. C’est d’autant plus emblématique que cela provient d’un organe indépendant politiquement et statuant sur une mesure au fond, au terme d’un parcours intellectuel motivé et argumenté juridiquement – une différence avec l’arrêt du Tribunal constitutionnel polonais en 2021. Celui-ci, motivé par une toute autre logique, avait estimé que les traités européens violaient la souveraineté du pays.
Contourner la difficulté : l’arrêt Bouillon (Conseil d’Etat, 2021).
Le CE était saisi par un gendarme contestant l’exclusion par le Ministère de l’Intérieur de la Gendarmerie départementale du champ d’application de la directive européenne de 2003 sur le temps de travail. Celle-ci avait en effet un champ d’application large et la CJUE, dans un arrêt en 2021 (C-742/19), ouvrait partiellement la voie à l’application d’un temps de travail pour les militaires.
Se basant sur une autre décision légèrement plus ancienne, le Conseil d’Etat a rappelé que la Constitution reste la norme suprême en droit français. Cela implique que le droit de l’UE ne doit pas compromettre l’application pratique des exigences imposées par le texte constitutionnel. Or, la juridiction administrative relève que le droit de l’UE ne protège pas aussi bien que le droit national certains principes – par essence inhérents à la souveraineté. C’est le cas du principe de libre disposition de la force armée, érigé au rang d’exigence constitutionnelle. De plus, le CE relève que les exceptions admises par la CJUE dans le cas slovène ne représentent qu’une part très limitée des activités de la Gendarmerie départementale (ce type de forces de l’ordre n’étant pas le plus répandu sur le continent). Néanmoins, les magistrats administratifs ont noté que les règles régissant les temps de repos dans l’ex-Maréchaussée sont mises en œuvre de telle sorte que l’objectif de 48 heures de travail hebdomadaire maximum est respecté. En effet, les astreintes ne doivent pas être comptabilisées comme du travail effectif.
Par ce raisonnement, le Conseil d’Etat n’a pas eu besoin de se pencher sur la compatibilité du droit européen par rapport à l’exigence constitutionnelle mentionnée ci-avant. Cette « pirouette » permet tout à la fois de préserver le statut et l’organisation de la Gendarmerie sans mettre le droit européen (et la CJUE) en porte-à-faux en s’opposant frontalement à la jurisprudence de Luxembourg.
Au global, la Cour peut avoir un effet important en matière de sécurité intérieure, mais pas davantage que dans d’autres domaines du droit de l’Union. Bien d’autres domaines sont sujets à un nombre de contentieux plus importants : TVA, propriété intellectuelle, substances chimiques, etc. Il ne faut ainsi pas essentialiser en parlant d’un « gouvernement des juges ». En effet, la très grande majorité des décisions n’emporte aucun effet pratique pour le droit de l’UE, soit parce qu’elles précisent un point objectivement peu clair soit car le recours est considéré comme irrecevable, non fondé ou tout simplement rejeté. En outre, ce que le juge dit sur base d’un texte et d’une interprétation à un temps donné peut se réformer au gré des colégislateurs si les conséquences sont considérées insupportables ou politiquement non admissibles.
- C – Quelles évolutions potentielles pour la justice européenne ?
Il est donc intéressant de noter que les principaux arrêts du droit européen se sont rendus, au moins aux débuts de la construction européenne, dans des matières très éloignées des questions de sécurité intérieure, de migration ou de citoyenneté. Les arrêts « pionniers » des années 1960 et 1970 portaient avant tout sur des questions de marché unique, de concurrence, de taxation ou de reconnaissance des produits. Cependant, c’est moins par leur résolution pratico-pratique que par le dispositif juridique qu’ils ont permis de véhiculer qu’ils sont célèbres. Le litige qui a motivé la saisie de l’alors Cour de justice des Communautés européennes – le terme « CJUE » n’est apparu qu’après le Traité de Lisbonne – s’efface presque devant la portée de l’arrêt de la Cour à son propos.
Ce n’est qu’avec l’arrivée de nouveaux domaines permis par le traité de Maastricht que la compétence de la justice européenne s’est élargi aux sujets de citoyenneté, d’asile et migration et de coopération policière et judiciaire. A noter en outre que les principales décisions concernant les affaires intérieures se font par le biais de questions préjudicielles, et non via des recours en manquement, en annulation ou en carence ; ce qui suggère bien la prédominance de ce contentieux au niveau national – simplement éclairée à la lumière des obligations européennes – et, ce faisant, toute l’importance du juge national qui est et reste le juge de droit commun de l’Union. Pourtant, par l’action combinée du juge national interrogeant le juge européen et ce dernier y répondant, on arrive à un droit de l’UE qui se renforce et se précise de manière presque « parallèle » aux règlements et directives adoptées par les colégislateurs.
Un autre aspect pourrait tendre à s’interroger sur la place des actions collectives dans l’espace juridique de l’UE. Historiquement, une requête est déposée par un requérant, une entreprise, un EM, etc. avec, au besoin et en soutien, un ou plusieurs intervenants dûment autorisés à soumettre leurs observations devant la chambre de jugement. Or, depuis quelques années, de plus en plus d’associations ou de fédérations de particuliers ou d’intérêts estent devant le juge de l’Union, particulièrement dans des recours touchant à la vie privée, au numérique ou à la défense des consommateurs. Si certains pas de l’UE comme la Belgique ou les Pays-Bas disposent déjà de véhicules juridiques permettant ce type d’actions collectives, dans beaucoup d’autres EM, de telles procédures sont tout simplement inexistantes. Surtout, elles rappellent le système américain, où les procédures collectives déchargent les tribunaux de nombreuses affaires connexes en objet et peuvent aboutir à des indemnisations record pour les plaignants.
Si le droit de l’UE n’en est pas encore à ce stade (et aux extrémités qu’il comporte per se), les possibilités existent : la directive 2020/1828 permet aux consommateurs de demander collectivement réparation pour un dommage via une « entité qualifiée » désignée par un EM et apte à intenter des recours de la sorte. La directive fait suite au scandale Volkswagen et aux moteurs « trafiqués » sur leur niveau de pollution réel, un domaine où de très nombreux consommateurs peuvent être lésés. Ce faisant, il n’est pas difficile d’imaginer que le numérique soit un domaine « d’opportunités » pour le développement de cette pratique. Ainsi, le 8 janvier 2025, le Tribunal de l’UE a jugé qu’un plaignant avait droit à des dommages et intérêts après avoir réussi à démontrer qu’une connexion sur le site de la Commission avec ses identifiants Facebook exposait ses données personnelles à une « certaine incertitude » quant à leur sort (T-354/22 Bindl/Commission).
Davantage que le simple cas individuel aux conséquences limitées (400 euros de dommages et intérêts), c’est sa potentielle exploitation pour des actions collectives qui laisse songeur. En effet, une violation du RGPD par un géant du numérique affecte des millions voire des dizaines de millions d’utilisateurs en même temps, et la caractérisation d’une infraction peut conduire à l’émergence d’un très grand nombre de recours en très peu de temps. Ce faisant, la multiplication des fameux 400 euros par une quantité de plaignants extrêmement élevée et regroupée en une seule action collective pourrait dans l’expectative aboutir à une amende d’un montant, sinon jamais vu, au moins très rarement infligé dans l’histoire des juridictions européennes.
Néanmoins, des limites existent, et peuvent contraindre l’ampleur de ces recours. En premier lieu le fait que la grande majorité des litiges soient avancés devant une cour nationale ; puisque les régulateurs nationaux sont les points de contact de référence dans l’application des règlements numériques (RGPD, DMA, DSA…). En effet, rappelons que la justice européenne ne peut être saisie que de requêtes impliquant une institution ou un organisme européen, et non d’un simple litige entre un particulier et une entreprise. C’est particulièrement le cas en Irlande, qui concentre la majorité des sièges sociaux européens de ces grands groupes, où le régulateur national peut mettre des années à effectuer les enquêtes et prononcer les amendes et où le droit procédural du pays est bien moins permissif en matière d’actions collectives. En second lieu, un tel recours peut être risqué en ce qu’il mobilise de nombreux avocats dans des matières complexes et hautement évolutives. Par là même, la solution au litige est incertaine et, attendu que la partie qui succombe en droit doit normalement payer les dépens de l’autre (honoraires d’avocats…), les coûts engendrés pourraient se transformer en barrière.
- En conclusion
C’est un lieu commun que d’affirmer l’importance de l’État de droit dans toute société démocratique, et singulièrement lorsque l’ordre juridique considéré est une accumulation de démocraties dotées chacune de leurs spécificités. Ce faisant, il est fréquent que le juge de l’Union soit perçu à travers le prisme restreint de certains arrêts « controversés » en matière pénale ou migratoire.
La focale médiatique se porte donc sur ces instantanés de justice, potentiellement extrapolés de leur portée réelle. De surcroit, cette perception réductrice occulte une réalité bien plus vaste et complexe. En effet, le rôle du juge s’étend bien au-delà de ce pourquoi on parle de lui :
- Protection des consommateurs, tant grâce au respect de normes sanitaires diverses que par la régulation des produits chimiques.
- Respect de la propriété intellectuelle (EUIPO), dont les arrêts du Tribunal font bien souvent très peu de bruit – alors qu’ils représentent une charge de travail assez conséquente.
- Recours en matière de fonction publique européenne. Le Tribunal connait un grand nombre de litiges concernant les fonctionnaires (ou autres : députés, candidats aux concours…).
- En sectoriel, difficile de ne pas évoquer son rôle dans les affaires de numérique, de protection des données, de respect du consentement ou des limites imposées par les règlements européens RGPD, DMA ou DSA. L’accès aux documents a aussi une place particulière – très médiatisée lorsqu’il est question de la Présidente de la Commission européenne et de commande de vaccins en contexte pandémique.
Il est ce faisant crucial de reconnaître que le champ d’activité du juge de l’Union est bien plus large et diversifié – et donc de replacer son office à la place qu’il mérite : des arrêts parfois critiquables en doctrine, qui peuvent faire débat (et heureusement) mais qui n’en restent pas moins essentiels dans la conception des contre-pouvoirs telle qu’elle existe dans le système européen. Si le règlement est mal fait, mal conçu, fruit d’arbitrages trop lâches, c’est au législateur de s’en saisir. Reporter sur la justice en général et la CJUE en particulier la faute d’un texte permissif et, parfois, contre-productif par rapport aux objectifs politiques et aux intérêts de l’Union n’est pas une situation d’avenir. Cela ne pourrait conduire qu’à renforcer la thèse un bouc-émissaire au lieu de faire advenir la résolution concrète et réfléchie du problème considéré.
- Sources et bibliographie :
Sources institutionnelles
Onglets « Procédure », « régime linguistique » et « Présentation » sur le site internet officiel de la Cour de justice de l’Union européenne. Disponibles sur : https://curia.europa.eu/jcms/jcms/Jo2_7040/fr/, https://curia.europa.eu/jcms/jcms/Jo2_10739/regime-linguistique-de-la-cour-de-justice-du-tribunal-de-premiere-instance-et-du-tribunal-de-la-fonction-publique et https://curia.europa.eu/jcms/jcms/Jo2_7024/fr/
« Contrôle de l’application de la législation: questions fréquemment posées », site internet officiel de la Commission européenne, 28/11/2022. Disponible sur : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/memo_12_12
« Jugement du 5 mai 2020 », Cour constitutionnelle fédérale allemande (Bundesverfassungsgericht). version française disponible sur : https://www.bundesverfassungsgericht.de/SharedDocs/Entscheidungen/FR/2020/05/rs20200505_2bvr085915fr.html?nn=148536
« Directive européenne sur le temps de travail : le Conseil d’Etat rejette la requête d’un gendarme qui contestait l’organisation du temps de travail dans la gendarmerie départementale », Explication de la décision du Conseil d’Etat, 16/12/2021. Disponible sur : https://www.conseil-etat.fr/actualites/directive-europeenne-sur-le-temps-de-travail-le-conseil-d-etat-rejette-la-requete-d-un-gendarme-qui-contestait-l-organisation-du-temps-de-travai
Procédures d’infractions prises par la Commission européenne : Décisions du 18/06/2025 et du 17/07/2025, coin presse. Disponibles respectivement sur : https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/inf_25_1241 et https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/inf_25_1628
« Transposition des directives », onglet informatif de la Commission européenne. Disponible sur : https://ec.europa.eu/implementing-eu-law/transposition-directives/fr
Sites Eur-Lex (portail numérique du droit de l’UE), Infocuria (répertoire de la jurisprudence) et des communiqués de presse de la CJUE pour diverses références juridiques d’appoint.
Sources de presse :
MARTUCCI Francesco, « La BCE et la Cour constitutionnelle allemande : comprendre l’arrêt du 5 mai de la Cour constitutionnelle allemande », Le club des juristes, 11/05/2020. Disponible sur : https://www.leclubdesjuristes.com/archives-cdj/la-bce-et-la-cour-constitutionnelle-allemande-comprendre-larret-du-5-mai-de-la-cour-constitutionnelle-allemande-2998/
MARTUCCI Francesco, « Primauté, identité et ultra vires : forger l’Union par le droit sans anéantir l’État de droit », Groupe d’études géopolitiques, Décembre 2021. Disponible sur : https://geopolitique.eu/articles/primaute-identite-et-ultra-vires-forger-lunion-par-le-droit-sans-aneantir-letat-de-droit/
« Mandat d’arrêt européen – la Suède et la Pologne traînées devant la CJUE », Agence Europe, bulletin quotidien, 19/06/2025. Disponible sur : https://agenceurope.eu/fr/bulletin/article/13662/31
« La Bulgarie, l’Irlande et le Portugal devant la CJUE pour avoir mal transposé le règlement sur le retrait des contenus terroristes en ligne », Agence Europe, bulletin quotidien, 19/06/2025. Disponible sur : https://agenceurope.eu/fr/bulletin/article/13662/30
CHATIGNOUX Catherine, « La justice polonaise défie l’UE sur la primauté du droit européen », Les Echos, 07/10/2021. Disponible sur : https://www.lesechos.fr/monde/europe/la-justice-polonaise-defie-lue-sur-la-primaute-du-droit-europeen-1353069
O’REGAN Ellen, « Europe’s privacy groups take on Big Tech with class action cases », Politico.eu, 14/07/2025. Disponible sur: https://www.politico.eu/article/great-multiplier-europe-privacy-groups-class-action-against-big-tech/
 
 
								