Rapport d’information sur les enjeux et perspectives de l’économie de guerre

Rapport d’information sur les enjeux et perspectives de l’économie de guerre
4 juin 2025 Olivier Debeney

Enjeux et perspectives de l’économie de Guerre

Le rapport d’information n° 1162 de l’Assemblée Nationale déposé le 20 mars 2025 vise à rapporter les enjeux et perspectives de l’économie de guerre soulevés lors des auditions de la commission de la Défense nationale et des Forces armées. Il apporte un éclairage sur les transformations à envisager pour renforcer la résilience industrielle de la France en temps de crise ou de conflit prolongé.


Contexte et définition

L’« économie de guerre » est définie non comme une économie en temps de guerre, mais comme une économie qui anticipe et se prépare à soutenir un effort militaire intense et prolongé en cas de conflit majeur

La loi de Programmation Militaire (LPM) 2019 – 2025, prévoit un budget global de 295 milliards d’euros. En 2023, les commandes adressées à la base industrielle et technologique de défense (BITD) ont atteint 20 milliards d’euros, marquant une accélération par rapport aux années précédentes. Sur la période 2012 – 2016, la moyenne annuelle des commandes BITD était de 9,5 milliards d’euros, et sur la période 2017 – 2022, de 15 milliards d’euros.

La LPM 2024 – 2030 prévoit un budget de 413 milliards d’euros. De manière générale, le budget alloué à la défense nationale ne cesse de croître.

Objectifs stratégiques

  •  Souveraineté et autonomie stratégique :
    • Réduction des dépendances critiques (titane, poudres, acier, minerais), notamment par la relocalisation de la production de poudre « gros calibre » à Bergerac
  •  Réindustrialisation :
    • Renforcement de la BITD :
      • 9 grands groupes industriels
      • 4 000 PME/ETI
      • 210 000 emplois directs
      • 30 Md€ de chiffre d’affaires annuel
  •  Adaptation aux conflits de haute intensité :
    • Production militaire accrue (munitions, drones, artillerie lourde, etc.) comme les canons CAESAR (Nexter) ou les Rafale (Dassault)

Diagnostic du rapport

  • Forces
    • Accélération des cadences de production (x5 entre 2022 – 2024)
    • Nouveaux outils juridiques : réquisitions, stocks stratégiques
    • Volonté politique affirmée (LPM 2024–2030)
  • Faiblesses
    • 30 % des entreprises BITD en difficulté d’approvisionnement (x2 par rapport à l’industrie générale)
    • 200 entreprises critiques en 2023 identifiées comme « goulets d’étranglement »
    • Accès au financement privé restreint (normes ESG pénalisantes)
    • Lourdeur normative, complexité administrative persistante

Propositions clés du rapport

Production & Relocalisation

  • Relancer les filières stratégiques (poudres, pyrotechnie, électronique de défense)

Simplification

  • Réforme des procédures de la Direction Générale de l’Armement
  • Création d’une force d’acquisition réactive

Financement

  • Création d’un Livret Défense
  • Mobilisation de l’épargne réglementée (Livret A, LDDS)
  • Soutien accru de Bpifrance et des banques commerciales

Europe de la Défense

  • Renforcement de la préférence européenne :
    • Objectif non atteint des 35 % de dépenses en coopération (actuel : 18 %)
    • 40 % des équipements européens sont achetés aux États-Unis
  • Soutien à :
    • EDIRPA (achats conjoints)
    • ASAP (munitions)
    • EDIP/EDIS (stratégie industrielle)

Innovation & Écologie de guerre

  • Création de l’Agence ministérielle pour l’IA de défense (AMIAD)
  • 2 Md€ investis dans l’IA d’ici 2030
  • Intégration des enjeux environnementaux :
    • Réduction des dépendances fossiles
    • Décarbonation des armées

Conclusions du rapport

L’économie de guerre n’est pas encore pleinement déployée mais des avancées sont constatées :

  • La disponibilité des nouveaux outils
  • Une prise de conscience stratégique amorcée
  • Un effort budgétaire engagé

Toutefois, le rapport préconise :

    • D’intensifier la mobilisation de la BITD
    • D’accroître la transparence des financements
    • De garantir une pédagogie publique sur les arbitrages budgétaires
    • D’élargir la préparation nationale (défense civile, opinion publique, éducation)
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